Comme nous l’avons largement évoqué dans les articles sur le lait végétal et l’article sur les crèmes et les yaourts végétaux, les produits laitiers d’origine animale issus d’animaux nourris aux céréales, légumineuses ou oléagineux ont un impact écologique important et dévastateur. Ces pratiques intensives émettent beaucoup de gaz à effet de serre, détruisent les écosystèmes liés aux cultures et épuisent sols et ressources en eau. Elles entraînent également une souffrance considérable pour les animaux. Leur alimentation non naturelle et la promiscuité dans les élevages affectent leur bien‑être et leur santé.
Dans ce contexte, même si les produits laitiers végétaux sont très loin d’égaler au niveau nutritionnel les produits laitiers d’origine animale, ils peuvent sembler, à juste titre, plus écologiques, car ils ne nécessitent pas d’élever des animaux. Cependant, ils reposent eux aussi sur des cultures intensives en monocultures destructrices, qui appauvrissent les sols, réduisent la biodiversité et entraînent la mort de nombreux animaux sauvages. Ces productions de produits végétaux mobilisent d’importantes ressources, non seulement lors de la culture des légumineuses et des oléagineux, mais aussi (ce qu’on oublie souvent) au moment de la fabrication. Les fauxmages sont en effet des produits transformés, voire ultra-transformés, dont le coût énergétique et écologique est fortement sous-estimés.
Rien n’est plus vertueux sur le plan écologique que les produits laitiers issus de vaches, de chèvres ou de brebis nourries exclusivement à l’herbe dans des pâturages naturels. Ces élevages extensifs favorisent la biodiversité, enrichissent les sols et permettent aux écosystèmes locaux de prospérer.
Sur le plan nutritionnel, les produits laitiers végétaux restent très inférieurs aux produits animaux. Ils sont généralement obtenus par des procédés industriels complexes, qui les rendent plus sucrés, pauvres en nutriments essentiels et moins bénéfiques pour la santé. Leur densité nutritionnelle ne peut en aucun cas égaler celle des produits laitiers fermentés d’origine animale, qui apportent protéines de qualité, lipides essentiels, vitamines et probiotiques.
Cette étude publiée en février 2025 a comparé des fromages issus de laits végétaux à des produits laitiers sur le marché slovène. La qualité a été vérifiée à la fois par analyse chimique et sensorielle. Les résultats de l'analyse chimique offrent une composition nutritionnelle des substituts de fromage à base de plantes par rapport à un fromage à pâte semi-dure : en moyenne, ils contenaient 60 fois moins de protéines, 8 fois moins de calcium et 50 % de sel en plus pour 100 g de produit. En considérant les valeurs médianes, les substituts végétaux contenaient 200 fois moins de protéines, 40 fois moins de calcium et 58 % de sel en plus que les fromages."
Majhenič et al., 2025, Les substituts de fromage à base de plantes peuvent-ils remplacer le fromage sur les plans nutritionnel et sensoriel dans notre alimentation ?
Enfin, ni les produits laitiers d’origine animale, ni les produits laitiers végétaux ne sont des aliments essentiels. Tous les nutriments qu’on espère y trouver se retrouvent dans la viande et dans une grande diversité de légumes. Si l’objectif est de minimiser l’impact écologique et de préserver la vie animale, qu’il s’agisse des animaux domestiques ou des animaux sauvages massivement détruits pour les cultures, il est préférable de consommer le moins souvent possible des produits laitiers d’origine animale, de ne surtout pas se tourner vers les produits laitiers végétaux et de choisir seulement et rarement des produits laitiers de vache, de brebis et de chèvres nourries exclusivement à l’herbe dans de petits élevages en milieu naturel. Il est illusoire de croire qu’un produit laitier végétal constitue toujours une meilleure alternative. Le véritable problème réside dans la consommation de ces aliments non essentiels et leur coût écologique élevé, et d’autant plus pour les produits laitiers végétaux, qui sont très pauvres en nutriments. De plus, les industriels ou les fabricants de fauxmage (fromage végétal) oublient souvent d’intégrer dans leur calcul le coût énergétique très élevé de l’ultra-transformation industrielle des aliments, qui est en réalité supérieur à celui de la fabrication des fromages laitiers. Les fauxmages sont des produits transformés, voire ultra-transformés, qui ne sont finalement ni si écologiques ni si protecteurs de la vie animale, à moins que la préservation de la vie sauvage ne soit tout simplement pas jugée importante ni digne d’intérêt.
5 exemples de fauxmage et leur composition
Il est à retenir que ces produits sont majoritairement composés de noix de cajou, d’amandes, de lait de coco et, pour certains, d’huile de tournesol. Ce sont des aliments dont l’impact écologique est préoccupant, en raison de la culture massive en monocultures qui entraîne l’éradication de la faune et de la flore sauvages. Chercher à épargner les animaux d’élevage se fait au prix de la mort massive d’insectes, d’oiseaux, de reptiles, de rongeurs et d’autres herbivores considérés comme nuisibles aux cultures, tout en les privant de l’espace nécessaire à leur reproduction, tandis que les pâturages sont de véritables réservoirs de biodiversité végétale et animale. Comme nous le verrons plus loin, la production de noix de cajou, d’amandes et de noix de coco est particulièrement destructrice pour les écosystèmes, la biodiversité et la vie des sols.
La noix de cajou possède un profil lipidique relativement intéressant pour une noix. Elle contient principalement des graisses monoinsaturées et des graisses saturées. Cependant, tout comme l’amande, elle reste trop riche en acides gras oméga-6 insaturés, pro-inflammatoires et oxydants. Le lait de coco, quant à lui, est riche en graisses saturées, ce qui peut être bénéfique, mais tous ces aliments sont importés et leur production a un impact écologique considérable.
Au premier abord, contrairement aux laits, crèmes et yaourts végétaux, les fauxmages peuvent sembler nutritionnellement intéressants, riches en lipides, protéines et minéraux. Cependant, tout comme les fromages d’origine animale, ils présentent de sérieux inconvénients pour la santé. Ces produits sont pro-inflammatoires en raison de leur forte teneur en acides gras oméga-6. Les protéines qu’ils contiennent sont moins bien assimilables que les protéines animales. De plus, de nombreux anti-nutriments présents dans les noix, amandes ou graines utilisées pour les fabriquer réduisent l’absorption et la biodisponibilité des minéraux essentiels tels que le calcium, le zinc ou le magnésium.
Ainsi, bien que leur composition puisse sembler intéressante sur le papier, leur valeur nutritionnelle reste nettement inférieure à celle des fromages d’origine animale, notamment pour les nutriments essentiels et la densité protéique. De plus, ces produits sont hautement transformés, ce qui accentue leur impact sur la santé tout en augmentant leur dépendance gustative. Sur le plan écologique, ils reposent sur des cultures intensives de noix de cajou, d’amandes ou de coco, entraînant destruction des écosystèmes, perte de biodiversité, mort massive d’animaux sauvages, épuisement des sols et de l’eau, rendant leur bilan environnemental très négatif.
En définitive, les fauxmages ne sont pas des produits vertueux malgré leur image flatteuse. Ils imitent des habitudes alimentaires qui devraient plutôt être réévaluées pour favoriser la durabilité des écosystèmes et le maintien de la santé humaine. Considérés comme des aliments non essentiels, ils combinent transformation industrielle, impact écologique élevé et qualité nutritionnelle limitée, ce qui les rend loin d’être indispensables ou réellement bénéfiques.
Un fauxmage pour imiter un fromage de chèvre :
Il est composé à près de 50% de noix de cajou, d’eau, de purée d’amande, de lait de coco, de sel et de ferments.
Pour 100 g, ce produit contient environ 30 g de lipides, moins de 10 g de glucides et environ 15 g de protéines.
Un fauxmage pour imiter le bleu d’Auvergne :
Il est composé de lait d’amande contenant 40% d’amande et 60% d’eau, de lait de coco, de noix de cajou, de ferments et de sel.
Pour 100 g, ce produit contient environ 25 g de lipides, moins de 10 g de glucides et 10 g de protéines.
Un fauxmage à pâte molle affiné sensé avoir du caractère :
Il est majoritairement composé de noix de cajou fermentées, d’eau, d’huile de tournesol, de sel et de ferments.
Pour 100 g, ce produit contient environ 30 g de lipides, 5 g de glucides et 12 g de protéines.
Un Fauxmage affiné :
Il est majoritairement composé de purée d’amande, de noix de cajou, de soja, de ferments et de sel.
Pour 100 g, ce produit contient environ 30 g de lipides, 6 g de glucides et 10 g de protéines.
Un fauxmage pour imiter le Cheddar :
Un mauvais élève en matière de composition qui fait penser à un produit ultra-transformé ?
Son premier ingrédient est de l’eau et de l’amidon modifié pour lui donner sa texture. Il contient plus de 20% d’huile de noix de coco, du sel, une saveur cheddar certainement chimique, de l’acide citrique, des colorants et de la vitamine B12. Une composition peu encourageante !
Pour 100 g, ce produit contient 25 g de lipides, 20 g de glucides (rendant le produit addictif, car dans les produits transformés, les glucides sont similaires au sucre pur) et pour ne rien arranger, ce produit ne fournit aucune protéine.
Des matières premières pas si éthiques et écologiques
Dans les produits végétaux, les fauxmages sont sans doute ceux qui s’éloignent le plus de leur objectif idéologique initial : éviter de tuer des animaux pour la consommation humaine. En réalité, la quasi-totalité des matières premières utilisées pour les fabriquer ont un coût écologique très élevé. Leurs cultures entraînent chaque année la mort d’un grand nombre d’animaux sauvages : insectes, pollinisateurs, reptiles, oiseaux, rongeurs, petits mammifères, herbivores, sans oublier toute la vie souterraine du sol.
La noix de cajou :
La noix de cajou est l’un des ingrédients phares des fromages végétaux. À première vue, en dehors de ses antinutriments qui freinent l’absorption des minéraux, de sa richesse en oméga-6 pro-inflammatoires et de la faible assimilation de ses protéines, elle pourrait sembler relativement acceptable sur le plan nutritionnel. Mais derrière cette apparence se cache une réalité beaucoup plus sombre.
Le premier problème est humain. Dans les pays producteurs comme l’Inde, le Vietnam, la Côte d’Ivoire ou encore la Tanzanie, les ouvrières qui décortiquent les noix de cajou travaillent souvent dans des conditions proches de l’esclavage moderne. Le décorticage manuel expose leurs mains à une résine corrosive qui provoque brûlures et lésions permanentes. Beaucoup n’ont ni gants ni protection, pour un salaire dérisoire.
Le second est écologique. Pour répondre à la demande mondiale en forte croissance, des forêts tropicales sont rasées afin de laisser place à des monocultures de cajou. Cette expansion entraîne déforestation, perte de biodiversité, appauvrissement des sols et usage massif de pesticides. Dans certaines régions sèches, la culture du cajou accentue aussi le stress hydrique.
Enfin, il faut ajouter le coût énergétique du transport. La quasi-totalité des noix de cajou est produite en Afrique ou en Asie, puis exportée vers l’Europe et l’Amérique du Nord, impliquant un lourd bilan carbone. Ainsi, ce qui est présenté comme une alternative durable repose en réalité sur une chaîne de production destructrice pour l’homme et pour la planète.
Mighty Earth, une organisation mondiale pour la défense de la planète publie en novembre 2023 son étude « The Cashew Conundrum ». Celle-ci révèle comment l'expansion des monocultures de noix de cajou en Afrique a des conséquences significatives sur la destruction de la biodiversité et la mise en péril de la sécurité alimentaire. On y apprend notamment que les monocultures de noix de cajou entraînent une réduction jusqu'à 84 % de la richesse des espèces dans certaines zones, chez les plantes, mais aussi les papillons, les oiseaux, les champignons et les mammifères. A titre d'exemple, "en Côte d'Ivoire, l’expansion des cultures de noix de cajou détruit l’habitat des chimpanzés d’Afrique de l’Ouest, des léopards, des servals, des céphalophes et des outardes, qui sont des espèces typiques des forêts claires et des savanes arborées."
Mighty Earth, 2023, Le dilemme de la noix de Cajou - Comment la demande mondiale pour ce superaliment entraîne la destruction de la nature et met en péril la sécurité alimentaire en Côte d'Ivoire
L’amande :
La culture de l’amande connaît un succès similaire, principalement aux États-Unis (Californie), en Espagne et en Australie. Mais elle est devenue l’un des symboles d’une agriculture intensive aux conséquences écologiques dramatiques.
Les besoins en eau de l’amandier sont considérables. En Californie, qui produit plus de 80 % des amandes mondiales, cette culture mobilise des milliards de litres d’eau chaque année, dans un contexte de sécheresse chronique. Cette irrigation massive vide les nappes phréatiques, assèche les sols et détruit les écosystèmes.
À cela s’ajoute la pollution générée par l’usage massif de pesticides destinés à protéger les vergers. Ces substances chimiques contaminent les sols, l’eau et déciment les insectes pollinisateurs. En raison de cette disparition progressive, les abeilles domestiquées par l’homme deviennent indispensables à la pollinisation des amandiers et sont particulièrement affectées. Chaque année, des millions d’entre elles meurent lors des campagnes de pollinisation intensive. Ainsi, un aliment présenté comme vegan et respectueux de la vie animale repose en réalité sur l’exploitation systématique des abeilles, déplacées en masse vers les cultures pour assurer la pollinisation. Une grande partie d’entre elles finit par mourir, affaiblie par l’exposition répétée aux pesticides.
Et comme pour la cajou, l’empreinte carbone du transport est loin d’être négligeable, car ces amandes parcourent des milliers de kilomètres avant d’arriver dans nos assiettes ou dans les rayons de nos magasins bio.
La noix de coco :
Les produits à base de coco (lait, huile, crème) sont très utilisés dans les alternatives végétales. Leur image exotique et naturelle séduit le consommateur, mais là encore, la réalité est beaucoup plus sombre.
Les conséquences écologiques de la coco sont majeures. Les cocoteraies remplacent des forêts tropicales riches en biodiversité. Comme pour l’huile de palme, cette expansion entraîne déforestation, perte d’habitats pour de nombreuses espèces, mort massive des animaux sauvages et destruction des écosystèmes. La monoculture de coco appauvrit aussi les sols et nécessite l’usage d’intrants chimiques.
Il existe aussi un scandale social. Les cueilleurs de noix de coco, dans des pays comme les Philippines, l’Indonésie ou l’Inde, sont souvent sous-payés et travaillent dans des conditions précaires. Certaines enquêtes ont même révélé l’utilisation de singes dressés pour récolter les noix de coco en Thaïlande, soulevant des questions éthiques supplémentaires.
Enfin, la coco est presque entièrement produite en zone tropicale, puis expédiée en Europe et en Amérique. Le coût énergétique du transport est donc considérable, augmentant son empreinte carbone déjà élevée.
À l'aide d'images satellites, les auteurs de cette étude, chercheurs de l'Université de Californie - Santa Barbara (UCSB) et de l'ONG The Nature Conservancy, "ont dressé la toute première carte exhaustive de l'emprise des cocoteraies à travers quelque 235 atolls du Pacifique (sur un total de 266 atolls)", mettant en lumière que "les cocotiers représentent aujourd'hui plus de la moitié de la couverture arborée de ces atolls (58,3 %)" dont la moitié correspond à des monocultures. Or, elles représentent un sérieux problème, "le remplacement des forêts de feuillus par des monocultures de noix de coco " étant associé "à l'épuisement des eaux souterraines, au déclin des populations d'oiseaux de mer, et à des effets néfastes sur les récifs coralliens adjacents".
Geo, 2025, Les cocotiers, un encombrant héritage colonial pour les atolls du Pacifique et leur biodiversité
Le tournesol :
L’huile de tournesol est souvent ajoutée dans les crèmes et fauxmages végétaux pour apporter de l’onctuosité. Mais comme pour toutes les cultures d’huiles végétales issues de graines, son impact est négatif.
La culture du tournesol est intensivement pratiquée en monoculture, notamment en Ukraine, en Russie et en Europe de l’Est, mais aussi en France et en Espagne. Elle appauvrit les sols, détruit la biodiversité et nécessite un recours massif aux engrais et pesticides. Le glyphosate et d’autres herbicides y sont fréquemment utilisés, contaminant l’eau et menaçant la vie microbienne des sols et la vie sauvage.
Sur le plan nutritionnel, l’huile de tournesol est riche en oméga 6, des acides gras pro-inflammatoires qui, consommés en excès, favorisent l’inflammation chronique et le déséquilibre lipidique. Elle contribue ainsi à l’effet délétère des produits transformés qui en contiennent.
Enfin, même si le tournesol est parfois produit plus près de nos régions, sa culture reste liée à des pratiques industrielles destructrices et participe au problème global des monocultures intensives.
Conclusion
Les produits laitiers d’origine animale issus d’animaux nourris aux céréales, aux protéines et aux graisses végétales sont extrêmement destructeurs pour l’environnement et leur consommation devrait être drastiquement réduite. Cependant, ils restent beaucoup plus denses sur le plan nutritionnel et plus facilement assimilables que les substituts végétaux. Il est même dangereux de penser qu’un fauxmage puisse être équivalent à un fromage.
Issus du végétal ou de l’animal, les produits laitiers peuvent avoir un effet négatif sur la santé et ne sont pas des aliments essentiels.
Parmi les produits végétaux, les fromages végétaux sont sans doute ceux ayant l’impact le plus lourd sur l’environnement et sur la vie animale sauvage. L’idéal serait donc de diminuer fortement la consommation de produits laitiers, de ne pas se tourner vers ces substituts végétaux, et de consommer très occasionnellement des produits laitiers issus de vaches, de brebis ou de chèvres nourries exclusivement à l’herbe et élevées en pâturages. Ce mode d’élevage est réellement vertueux et permet de régénérer la faune, la flore et la vie des sols.
Faire un acte écologique et en faveur des animaux consiste avant tout à changer son mode de consommation, sans chercher à reproduire des produits qui ne sont pas indispensables à la santé ou à la nutrition.